MALEDICTION - Chapitre VI
Les cachots de Gadûnzor formaient un secteur de taille modeste et Aksaros en sortit rapidement. Son chemin croisa celui de deux autres gardes en patrouille qu'il expédia ad patres avec la précision et la rapidité d'un fauve, sans le moindre remord, ce qui lui permit en sus de compléter sa panoplie avec une dague et une arbalète. Désormais bien équipé et animé d'un irrépressible désir de tuer, au mépris même de sa vie, il se dirigea d'un pas sûr et inexorable vers la chambre de Diranis, que le sort de visualisation lui avait permis de localiser. Il enfonça la porte à grands coups de haches et lorsque sa silhouette vengeresse apparut, la guerrière à la chevelure rousse, armée de pied en cap, resta bouche bée, les yeux écarquillés, médusée de cette apparition aussi inattendue qu'inquiétante.
« Tes ébats sont-ils terminés, Diranis ? Je suis venu pour te tuer, lança le Xèrien d'une voix implacable, et par respect pour ta déesse, je préfère que tu meures debout, guerrière de Vanji !
- Comment... Comment as-tu fait ? J'avais la clé de ta cellule... C'est impossible... Impossible, répéta la guerrière, pétrifiée de stupeur.
- La magie, Diranis, la magie fait des miracles. J'ai appris quelques tours utiles chez les elfes de Thosq, vois-tu. Tu n'aurais pas dû me sous-estimer. Salantès a fait cette erreur une fois, et je pense qu'il s'en mord encore les doigts.
- Je vois, nous t'avons sous-estimé, en effet. Mais il y a ici des mages bien plus puissants que toi » répliqua Diranis, qui retrouvait progressivement son calme.
Elle fixa l'arbalète braquée sur elle avec un apparent détachement, un dédain à peine voilé.
« Tu n'oseras pas tirer » ajouta-t-elle, avec un sourire confiant en plongeant ses yeux magnifiques dans ceux du Xèrien.
L'instant d'après, la corde de l'arbalète vibra et le carreau perça l'estomac de Diranis, qui s'effondra. Aksaros s'approcha d'elle d'un pas nonchalant.
« Tu disais ? dit-il en éclatant d'un rire sardonique. Mais ne t'inquiète pas, ton amant Zoldar te rejoindra bientôt au royaume des ombres.
- Je... Je te maudis, Aksaros, que Vanji pourrisse tes chairs et réduisent tes os en poussière... Tu... Tu ne pourras jamais vaincre la Confrérie de l'Orbe d'Onyx... »
Le Xèrien s'agenouilla et pencha son visage jusqu'à presque effleurer celui de la guerrière blessée.
« Tu n'aurais pas dû te moquer de mes sentiments, dit-il et ses yeux luisaient de haine. Tu as choisi le mauvais camp, Diranis, et la mort seule sanctionnera cette erreur. »
Il dégaina lentement sa dague et se prépara à l'enfoncer dans la poitrine de son ancienne compagne d'armes. Dans un geste désespéré, Diranis saisit la main d'Aksaros et tenta de l'empêcher de porter le coup fatal en retournant l'arme contre lui, mais la douleur et le sang qui coulait à flot l'avaient affaiblie. D'une vigoureuse pression, le Xèrien lui transperça le cœur. Les mains de la guerrière se crispèrent, puis, dans un râle d'agonie, elle rendit l'âme et le voile de la mort tomba tel un linceul sur ses yeux au regard vide. Aksaros prit le temps de se relever, contemplant son forfait. Puis, s'emparant d'une lampe à huile qui éclairait la pièce, il la jeta sur le lit qui aussitôt s'enflamma.
« Pas de sépulture pour toi, Diranis d'Othra, murmura-t-il en regardant le brasier, ton corps brûlera comme celui des rois barbares de jadis, et jamais ton âme ne connaîtra le repos. »
