Le Blog de Carloman

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MALEDICTION - Chapitre II

 

Aksaros se sentit tomber dans les ténèbres. Il voulut bouger, mais son corps était paralysé. Il voulut crier, mais aucun son ne sortit de ses lèvres. La chute lui parut interminable. Enfin, il lui sembla toucher le sol. Il n'y avait cependant autour de lui qu'une obscurité épaisse, impénétrable, terrifiante. Puis une faible lumière apparut au loin, mais elle n'avait rien de très rassurant. Le Xèrien se réveilla en sursaut, couvert de sueur, le cœur battant vite et fort... pour s'apercevoir que son cauchemar n'était pas si éloigné de la réalité ! Quelle sorcellerie était-ce ? Il se trouvait dans une sorte de caverne, faiblement éclairée par deux torches. Le mercenaire se redressa et instinctivement porta la main à son épée. Au moins, il avait son arme avec lui, et ce constat le rasséréna quelque peu. Tandis qu'il tentait d'analyser la situation, un grondement, bestial, inhumain, déchira l'obscurité, et Aksaros bondit sur ses pieds, dégainant son épée à lame flamberge. Il pesta intérieurement d'être privé de son bouclier, de son casque et de son arbalète qui lui auraient été bien utiles. Mal réveillé, encore effrayé, il ne put réprimer un frisson de peur. Il se rapprocha d'une torche. L'endroit ressemblait à une ancienne mine, et le mercenaire vit que la galerie était étayée par de grosses poutres de sapin. Le grondement résonna à nouveau, emplissant tout l'espace. Le Xèrien se mit dos à la paroi et perçut un frottement sur la gauche.

 

A peine avait-il tourné la tête dans cette direction qu'une créature émergea de la pénombre, et l'homme se trouva face-à-face avec une sphinge, un monstre hybride de l'ancien temps : son arrière-train était celui d'une lionne mais tout le haut du corps offrait de troublantes similitudes avec le buste d'une femme, exhibant même une généreuse poitrine, cependant que les bras se terminaient comme les pattes d'un lion, tandis qu'une grande paire d'ailes emplumées prenait place en haut du dos. La tête ressemblait beaucoup à celle d'une femme avec une abondante chevelure fauve, mais les oreilles étaient pointues – moins longues et effilées cependant que celles d'un elfe – et d'imposantes canines dépassaient des lèvres, laissant peu de doute sur le régime alimentaire de la créature. Pour tout ornement, la sphinge portait, comme c'était l'usage pour cette race, une tiare cylindrique en métal, peinte de couleurs vives, et, plus inhabituel, un diadème d'argent incrusté d'une unique pierre rouge sang au milieu du front. Les yeux du monstre, injectés de sang, luisaient d'une férocité meurtrière. Aksaros avait déjà aperçu des sphinges – les seigneurs elfes de Thosq en prenaient à leur service – mais c'était la première fois qu'il en voyait une d'aussi près, et surtout qu'il allait devoir l'affronter. Outre ses crocs, la créature possédait des griffes rétractiles à l'extrémité de ses puissantes pattes. Le Xèrien serra la poignée de son épée. Seule sa cuirasse en plaques de bronze et pièces d'alliage rouge-ocre le protégeait. Étant en posture défavorable, il estima qu'il fallait tout miser sur le premier coup et décida de frapper à la tête. Fracasser le crâne de la créature – ou tout du moins l'assommer – c'était là sa seule chance.

 

La sphinge fondit sur lui et Aksaros leva le bras pour frapper. Son épée s'abattit avec force, mais brisa seulement le diadème de la créature sans lui causer d'autre dommage qu'une égratignure au niveau de la tempe, tandis que d'un coup de patte, le monstre le jeta au sol. Le mercenaire, un peu sonné, se releva le plus rapidement possible, se ramassa sur lui-même, adressa une muette et brève prière à ses dieux et se prépara à mourir, non sans avoir chèrement vendu sa peau. Mais le spectacle qui s'offrit à ses yeux le laissa perplexe. En se cassant, le diadème libéra un éclair, rouge et aveuglant. La sphinge poussa un long cri aigu, insupportable à l'ouïe humaine. Aksaros lâcha son épée, recula et se blottit contre la paroi en se bouchant les oreilles, sentant sa raison chavirer. Le monstre semblait à présent avoir oublié le Xèrien. Il faisait des bonds complètement désordonnés, se cognant violemment contre les murs, heurtant le plafond de la galerie, renversant dans sa folie apparente une torche. Puis la créature disparut dans les ténèbres en hurlant. Hagard, tremblant, Aksaros fixait la direction prise par la sphinge, quand il reçut un violent coup à la nuque et perdit connaissance.

 

Chapitre III



20/04/2021
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